Un plan pour anticiper la prochaine crise sanitaire
Le 29 octobre 2021, le Conseil des ministres fédéral a adopté le Plan d'action national belge « One Health », qui vise à lutter contre la résistance aux antimicrobiens (AMR), en d’autres mots la résistance aux antibiotiques. Ce plan contient une série de mesures et de crédits supplémentaires pour les années 2022, 2023 et 2024, dans le but de réduire la consommation d’antibiotiques dans notre pays. Une nécessité car la Belgique se situe au-dessus de la médiane européenne en matière de consommation d’antibiotiques, tant dans le secteur humain que vétérinaire.
Les antibiotiques servent à lutter contre les infections bactériennes. Toutefois, si un antibiotique est utilisé régulièrement contre une bactérie, cette dernière peut devenir résistante au médicament. L'utilisation élevée d'antibiotiques comporte donc des risques énormes pour notre santé publique.
Petra De Sutter : « Si les antibiotiques que nous avons développés n'ont plus d'effet, certaines infections qui sont aujourd’hui traitées sans problème pourront devenir mortelles. La chirurgie et le traitement du cancer, qui comportent un risque infectieux élevé, deviendront alors très dangereux et les transplantations d’organes deviendront même quasi impossibles. De nombreuses personnes se rendent compte que prendre des antibiotiques trop souvent n'est pas bon, mais à l'échelle de la société, les conséquences pourraient même se révéler catastrophiques. »
Il est urgent d’agir
En Belgique, on estime que 530 décès en Belgique sont imputables à la résistance aux antibiotiques chaque année, mais d'ici 2050, on estime que 22.500 personnes en seront mortes si aucune autre mesure de contrôle n'est prise. L’OCDE estime qu’une moyenne de 76 586 jours d'hospitalisation supplémentaires est associée à la résistance aux antibiotiques en Belgique, chaque année.
Petra De Sutter : « Le plan d'action fédéral arrive à point nommé. La crise du Covid-19 nous a cruellement montré les effets qu’une crise sanitaire peut avoir sur notre société, le taux de mortalité et les soins réguliers. Avec une consommation d'antibiotiques aussi élevée dans notre pays, la prochaine crise est à nos portes. Et les proportions ne doivent pas être sous-estimées : tout le monde a déjà contracté une infection et a eu besoin d'un antibiotique. Il faut donc réagir à temps, tant que la prévention est encore possible.»
230 actions
Le plan d'action One Health du gouvernement fédéral vise à lutter contre la résistance aux antibiotiques à travers 10 axes stratégiques déclinés en 76 objectifs opérationnels et plus de 230 actions. Par exemple, les antibiotiques ne peuvent plus être livrés en grands conditionnements, mais les patients ne doivent disposer que des comprimés dont ils ont besoin. Les médecins seront soutenus par le développement d’un module d'aide à la décision dans le dossier médical informatisé du patient afin d’évaluer la nécessité réelle des antibiotiques. Des alternatives aux antibiotiques, comme la phagothérapie ou les vaccins, seront également étudiées.
Le plan d'action, élaboré sous l’égide du Ministre fédéral de la Santé, Frank Vandenbroucke, et promu par la Ministre de l'Environnement Zakia Khattabi et le Ministre des Indépendants David Clarinval, vise en outre à rassembler les diverses initiatives éparses en matière de lutte contre la résistance aux antimicrobiens au sein de notre État fédéral. Étant donné qu'une grande partie du problème se situe dans les soins de première ligne, qui sont une compétence des entités fédérées, la coordination est primordiale. Pour que ce Plan visant à réduire la consommation d’antibiotiques soit couronné de succès, il est indispensable que les entités fédérées déploient également des efforts, car les investissements consentis aujourd’hui dans la prévention porteront massivement leurs fruits dans le futur.